facture électronique

La facturation électronique

FOCUS

Auteur : Marina Chanian

Editeur : Jean Albert

Temps de lecture : 9mn| Horodatage

La dématérialisation des factures permet aux entreprises de conserver les éléments comptables tels que les factures émises et les justificatifs de dépenses dans un format électronique reconnu par l’administration fiscale. Cette numérisation a donc pour but de créer une copie conforme de la facture originellement établie sur papier sans obligation de conservation de celle-ci pour les besoins de la TVA. Cela représente ainsi un gain de temps et de place considérable pour les sociétés. Néanmoins, la validité des factures dématérialisées est subordonnée au respect de diverses dispositions.

La législation actuelle

Selon la doctrine, une facture est définie comme « tout document délivré dans les conditions prévues par le Code général des impôts (CGI) et ses annexes, notamment au regard des mentions obligatoires, quelle que soit la qualification donnée à ce document par les parties (quittance, note, relevé, compt rendu et.) »[1].

L’article L 102 B du livre des procédures fiscales modifié par l’article 16 de la loi de finances rectificative pour 2016 autorise la dématérialisation des factures. Ainsi, les contribuables sont autorisés à mettre sous format électronique les factures papier reçues ou émises et à les conserver sous forme numérisée pendant la période légale de conservation de 6 ans pour les factures fiscales et de 10 ans pour les factures comptables.

Un arrêté ministériel en date du 30 mars 2017 codifié sous l’article A 102 B précise les conditions dans lesquelles les factures peuvent être dématérialisées et conservées :

  • Elles doivent être reproduites à l’identique de sorte que l’ensemble des mentions obligatoires apparaissant sur le format papier soit présentes sur la facture électronique ;
  • La dématérialisation ne doit pas se faire via un outil de traitement d’images ;
  • Il ne doit pas y avoir de pertes en cas de compression des fichiers ;
  • Les factures doivent faire état d’une empreinte numérique, d’un cachet serveur au minimum de niveau RGS 1*, d’une signature électronique au minimum de niveau RGS 1*, ou de mesures équivalentes faisant l’objet d’un certificat délivré par l’une des autorités listées par le Trust Service Status List – TSL ;
  • Les factures doivent être horodatées afin de garantir leur existence à un moment précis ;
  • Une fois numérisées, les factures doivent être conservées au format PDF ou PDF A/3 (ISO 19005-3) ;
  • La numérisation doit être acceptée par le destinataire.

Par ailleurs, afin de conserver les factures numérisées, les entreprises sont tenues, selon l’article 289 VII 1° du Code Général des Impôts, de mettre en place un protocole interne documenté mentionnant l’ensemble des étapes de la dématérialisation. Celui-ci doit également s’accompagner de contrôles réguliers permettant de s’assurer que l’ensemble des étapes prévues à la procédure est respecté.

De plus, même si les articles 289 et 289 V du Code Général des Impôts autorisent le remplacement des factures papier par des factures électroniques, il apparaît clairement que l’Etat, y voyant un moyen de lutter contre la fraude à la TVA, souhaite accélérer l’utilisation de ce type de facturation. Ainsi, depuis l’ordonnance du 26 juin 2014, la facturation électronique est obligatoire pour les entreprises émettant ou recevant des factures d’établissement du secteur public. Cette obligation est entrée en vigueur de façon progressive depuis 2017 et est depuis le 1er janvier 2020 étendue à toutes les entreprises. La loi Macron du 6 août 2015 impose également aux entreprises l’acceptation des factures électroniques transmises par toutes sociétés du secteur privé.

Les factures électroniques sont également reconnues au niveau européen par la directive 2001/115/CE.

Ainsi, le simple fait de scanner une facture papier ne suffit pas à rendre celle-ci valide aux yeux de l’administration. Dans un tel cas, la TVA ne pourrait être traitée et l’entreprise se verrait ainsi potentiellement refuser la déduction de celle-ci dans le calcul de résultat. Les entreprises encourent également une amende de 15 € par information manquante et par facture sans que le montant ne puisse dépasser le quart de la somme totale, si la facture numérisée n’est pas identique à l’originale. Il apparaît donc clairement que seules les factures numérisées dans les conditions énumérées ci-dessus, et donc horodatées, sont reconnues par l’administration fiscale.

L’horodatage : un outil indispensable au processus de dématérialisation légale des factures

L’horodatage est un procédé permettant d’apposer une date et une heure à une donnée informatique, afin d’attester, par le recours ou non à un tiers de confiance, de son existence à un instant précis.

Le règlement « eIDAS » du 23 juillet 2014, pour la confiance des transactions électroniques au sein du marché intérieur, opère une distinction entre l’horodatage électronique qualifié et celui appelé simple ou non qualifié.

Selon l’article 42 dudit règlement, un horodatage électronique est considéré comme qualifié lorsqu’il remplit les conditions suivantes :

  • Il lie la date et l’heure associées aux données, de manière à raisonnablement exclure la possibilité de modification indétectable des données ;
  • Il est fondé sur une horloge exacte liée au temps universel coordonné ;
  • Il est signé au moyen d’une signature électronique avancée ou cachetée, par un cachet électronique avancé du prestataire de services de confiance qualifié ou par une méthode équivalente.

Ainsi, l’horodatage électronique qualifié avec recours à un tiers de confiance est un outil permettant d’associer la représentation d’une donnée à un moment précis. Pour ce faire, à partir d’une donnée sous forme électronique, nous allons obtenir une empreinte numérique grâce à la fonction de hachage. Cette étape est essentielle afin d’obtenir une représentation certaine et unique de la donnée, tout en réduisant la taille, qui est ensuite transmise au prestataire de services d’horodatage électronique.

A réception de cette empreinte, ledit prestataire de confiance y associe une date et une heure exactes fondées sur le temps universel coordonné (UTC). La garantie de cette association est fournie au moyen d’une contremarque de temps, qui est une forme d’attestation signée contenant l’empreinte numérique ou représentation de la donnée, la date et l’heure UTC ainsi que le cachet de contremarque de temps.

De plus, un décret sur l’horodatage précise que le cachet de contremarque de temps permet l’identification du tiers de confiance qui le délivre et ainsi l’assurance d’un suivi. Ce cachet fait l’objet d’un chiffrement par clé privée détenu par le prestataire et d’une clé publique qui sera remise au bénéficiaire, ce qui garantit la sécurité des données. A la fin du processus d’horodatage, tous ces éléments sont remis à l’utilisateur, en plus d’être archivés par un prestataire de confiance.

En termes de dématérialisation légale des factures, un horodatage certifié par un tiers de confiance, tel que l’Agence pour la protection des programmes (APP), ou un processus d’horodatage qualifié, est essentiel afin d’éviter toute contestation. Et cela d’autant que l’horodatage des factures sert aussi à faire courir les délais de paiement et à calculer les pénalités de retard. Pour ce faire, l’APP a développé une API à laquelle peuvent se connecter les membres pour obtenir un horodatage certifié automatisé de chaque document avec en sus la possibilité d’un archivage sécurisé. Cette API a pour avantage d’être simple d’utilisation, ne requérant que 4 étapes, tout en permettant une communication transparente ainsi qu’une gestion efficace des volumes. L’horodatage qualifié ou certifié est donc un outil probatoire indispensable afin de répondre aux obligations en termes de dématérialisation des factures bientôt étendue.

La loi de finance 2020 : Vers une facturation électronique obligatoire des entreprises du secteur privé

Dans un souci toujours croissant de lutter contre la fraude à la TVA, la loi de finance 2020, dans son article 153, impose la facturation électronique pour les transactions inter-entreprises. Cette nouvelle obligation entrera en vigueur de façon progressive en tenant compte de la taille des sociétés concernées, entre le 1er janvier 2023 et le 1er janvier 2025. Afin que cette nouvelle obligation pour les entreprises produise tous ses effets, la direction générale des finances publiques recommande d’instaurer conjointement à la dématérialisation des factures, un système de transmission électronique des données. Cette obligation à venir concernant la réalisation et l’émission de factures électroniques présente de nombreux avantages pour les entreprises, notamment en termes de coût et de suivi. En effet, les factures électroniques sont moins onéreuses que celles sur papier et permettent également aux entreprises de mettre en place un système de traitement automatisé, afin de réaliser des suivis réguliers et ainsi de limiter les litiges relatifs au paiement. Les déclarations concernant la TVA seront également facilitées par le pré-remplissage automatique. Cette dématérialisation des factures présente également un avantage indéniable en ce qui concerne la lutte contre la fraude fiscale, car elle permet à l’Etat de contrôler l’ensemble des déclarations de TVA réalisées. Pour cela, dans un rapport intitulé « La TVA à l’heure du digital en France », la direction générale des finances publiques préconise que la transmission des factures électroniques soit accompagnée de certaines informations. Parmi celles-ci figurent la date à laquelle la TVA est exigible et la nature des opérations réalisées. Si celles-ci concernent des transactions à l’étranger, ou si elles sont établies au bénéfice de particuliers ou d’entreprises.

La direction générale des finances publiques reste néanmoins vigilante sur la mise en œuvre de cette nouvelle règlementation et craint un contrôle trop important de l’Etat, ce qui encouragerait les entreprises à faire appel à des prestataires étrangers et risquerait de porter atteinte au secret des affaires.

[1] BOI-TVA-DECLA-30-20-10, §1, bofip.Impôts.gouv.fr, https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/1525-PGP.html/identifiant%3DBOI-TVA-DECLA-30-20-10-20190925

Sources :

 https://www.l-expert-comptable.com/a/52642-numeriser-ses-factures-procedure-suivre-et-sanctions-en-cas-de-non-conformite.html

https://www.archimag.com/demat-cloud/2021/02/23/facture-electronique-obligation-horizon-2023-2025-docuware

https://www.pwcavocats.com/fr/ealertes/ealertes-france/2017/avril/numerisation-conservation-factures-precisions-administration-fiscales.html

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