Droit d’auteur : protéger au mieux votre logiciel aux États-Unis

Droit d’auteur : protéger au mieux votre logiciel aux États-Unis

Article rédigé par Garance GONNET PRINCE, juriste PI à l’APP.

Temps de lecture : 5mn| Dépôt

La protection de vos droits d’auteur sur votre logiciel est un enjeu majeur pour le développement de votre entreprise à l’international. Bien que les États-Unis fassent partie des États signataires de la Convention de Berne, le marché américain présente certaines spécificités en matière de droit d’auteur qu’il est important de maitriser.

Le droit d’auteur à l’international

La Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, adoptée en 1886, a permis d’harmoniser les règles du droit d’auteur au niveau international.

A ce jour, 181 États ont signé cette convention. Parmi ces 181 États on compte la France et l’ensemble des États de l’Union Européenne mais également les États-Unis.

Les principes fondamentaux

Cette convention pose trois principes fondamentaux :

  • le principe du traitement national,
  • le principe de protection automatique,
  • le principe d’indépendance de la protection.

 

La définition d’une « oeuvre »

Par ailleurs, la Convention de Berne retient une définition très large de ce qui doit être considéré comme une « œuvre » au sens du droit d’auteur. C’est en application de cette définition que les logiciels sont considérés comme des œuvres dans tous les États signataires de la convention.

 

Les droits patrimoniaux

De plus, la convention liste les droits patrimoniaux qui doivent être reconnus dans les États signataires et fixe la durée minimale de ces droits à 50 ans après la mort de l’auteur.

Les États signataires sont libres de prévoir une durée plus longue. En France, ces droits durent 70 ans après la mort de l’auteur. Aux États-Unis, ils durent :

-pour les œuvres créées à partir du 1er janvier 1978, 70 ans après la mort de l’auteur (et pour le cas des œuvres produites par plusieurs auteurs, 70 ans après la mort du dernier auteur survivant).

-pour les œuvres réalisées pour le compte d’autrui (c’est-à-dire soit une œuvre créée par un employé dans le cadre de son contrat de travail, soit une œuvre commandée), 95 ans à compter de la première publication de l’œuvre ou 120 ans à compter de sa création, sachant que l’on retiendra la période la plus courte des deux.

 

Le droit moral

Enfin, la convention impose aux États signataires de reconnaitre le droit moral des auteurs. Il s’agit du droit pour l’auteur :

  • de revendiquer la paternité de l’œuvre
  • de s’opposer à toute mutilation, déformation ou autre modification de l’œuvre
  • de s’opposer à toute autre atteinte qui serait préjudiciable à l’honneur ou à la réputation de l’auteur

Il convient de souligner ici que, dans la quasi-totalité des États signataires, le droit moral est sérieusement amoindri concernant les logiciels. En effet, les États font souvent une différence entre les œuvres « classiques » d’un côté, comme les tableaux par exemple, et les œuvres « utilitaires » de l’autre, comme les logiciels.

Cela est particulièrement vrai aux États-Unis, où le droit moral sera presque inexistant en matière de logiciels.

 

Les moyens de protection du logiciel au niveau international

Dans tous les États signataires de la Convention de Berne, en application du principe de protection automatique, les auteurs n’ont pas besoin d’effectuer de formalités pour être titulaires de droits sur leurs œuvres. Leurs droits naissent du simple fait de la création de l’œuvre.

Néanmoins, ce point doit être largement nuancé en pratique. Si un auteur ne procède à aucune démarche pour protéger ses droits sur son œuvre, étant donné qu’aucun titre de propriété ne lui a été remis, alors il pourra difficilement prouver de manière certaine l’existence et l’antériorité de ses droits.

Pour pallier ce problème, les auteurs peuvent avoir recours à différents moyens, le plus fiable étant d’effectuer un dépôt auprès d’un tiers afin d’obtenir un certificat probatoire.

Un certificat probatoire remis par un tiers de confiance dans l’un des États signataires de la Convention de Berne pourra être présenté devant les juridictions de n’importe lequel des autres États signataires. Mais cette dernière affirmation doit être fortement tempérée dans le cas des États-Unis.

 

FOCUS : les moyens de protection du logiciel aux États-Unis

 

 Le principe de protection automatique

Les États-Unis faisant partie des États signataires de la Convention de Berne, le principe de protection automatique s’applique sur le territoire américain et il n’y a donc pas d’enregistrement obligatoire.

Si cette règle est vraie en principe, la réalité pratique est toute autre. Un certain nombre de réserves doivent être apportées, réserves qu’il est primordial de garder à l’esprit avant de s’exporter sur le territoire américain.

Il est parfaitement possible de poursuivre un contrefacteur aux États-Unis sans avoir accompli de formalités. L’action sera, en application de la Convention de Berne, recevable.

En revanche, l’auteur aura plus de mal à prouver l’existence et l’antériorité de ses droits et surtout il ne pourra être indemnisé que du préjudice réellement subi. Il sera assez difficile de rapporter la preuve de ce préjudice et l’indemnisation que l’auteur peut espérer obtenir sera relativement faible.

 

La mention « Copyright » ou ©

Notre première recommandation est d’apposer la mention « Copyright » ou © (suivie de l’année de première publication et du nom du titulaire de droits) aux œuvres que vous commercialisez aux États-Unis. Cette précaution n’est évidemment pas obligatoire, mais elle est relativement simple à mettre en place et peut s’avérer très utile en pratique car cela montre que l’œuvre a bien un auteur et que cet auteur bénéficie d’une protection au titre de la Convention de Berne.

 

L’enregistrement auprès du Copyright Office

Notre seconde recommandation concerne le Copyright Office. Il s’agit d’un organisme gouvernemental américain qui est en charge, entre autres, d’enregistrer les œuvres protégées par des droits d’auteur et de consigner les informations relatives à la titularité des droits d’auteur.

Enregistrer son œuvre auprès du Copyright Office apporte plusieurs avantages :

  • Cela va vous donner un moyen de preuve de vos droits avec une valeur probante plus importante. Vous disposerez d’un certificat qui vous permettra de faire valoir vos droits bien plus facilement dans le cadre d’un litige car les juges américains sont plus enclins à donner droit à des actions qui sont fondées sur un enregistrement auprès du Copyright Office.

Les informations sur le certificat d’enregistrement remis par le Copyright Office sont présumées exactes. La charge de la preuve reposera donc sur la partie adverse, c’est-à-dire que ce sera à la partie adverse de prouver qu’une information présente sur votre certificat est fausse (et non pas à vous de prouver qu’elle est vraie).

  • Cela vous permettra d’obtenir des dommages et intérêts forfaitaires beaucoup plus importants que ceux que vous auriez obtenus si vous n’aviez pas effectué d’enregistrement auprès du Copyright Office. Ce sont ce qu’on appelle les « statutory damages ». Il s’agit de dommages et intérêts fixés par la loi.

De plus, vous aurez également la possibilité de vous faire rembourser vos honoraires d’avocat, qui peuvent être très élevés aux États-Unis.

  • Vous pourrez facilement faire valoir vos droits d’auteur auprès des douanes américaines. L’intérêt est de pouvoir bloquer les importations et/ou exportations de contrefaçons de votre création sur et/ou depuis le territoire américain.

 

Tout titulaire de droits peut présenter une demande d’enregistrement auprès du Copyright Office. Il faut remplir un formulaire, payer les frais d’enregistrement et fournir un exemplaire de l’œuvre. Le plus simple est d’effectuer une demande en ligne, cela offre plusieurs avantages :

  • des frais de dépôt réduits
  • un examen plus rapide
  • un suivi du statut de votre demande
  • la possibilité de payer par carte de crédit, carte de débit ou chèque électronique
  • et surtout la possibilité de choisir entre télécharger une copie numérique de votre œuvre ou envoyer une ou plusieurs copies physiques de votre œuvre par courrier.

Il existe plusieurs options d’enregistrement, et il faudra choisir celle qui correspond le mieux à votre situation en fonction notamment du type d’œuvre déposé.

 

Conclusion

Le droit d’auteur est harmonisé à l’international grâce à la Convention de Berne, dont 181 États sont signataires à ce jour (dont l’ensemble des pays de l’Union Européenne et les États-Unis).

En application de cette convention, les logiciels sont considérés comme des œuvres et sont automatiquement protégés, sans formalités obligatoires, dans tous les États signataires.

Néanmoins, aux États-Unis, il est possible de faire valoir plus facilement vos droits en enregistrant vos œuvres auprès du Copyright Office. Cet enregistrement ne constitue certes pas un préalable obligatoire à la protection d’une œuvre mais il apporte de réels avantages aux auteurs qui y ont recours.

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